Face au tollé provoqué par la réforme du marché du travail, surgit l'idée d'un salaire minimum.
Par Odile BENYAHIA-KOUIDER
correspondante en Berlin du Liberation
"Un Smic en Allemagne pour calmer les manifestants ? C'était l'idée du président du SPD (Parti social-démocrate) de Gerhard Schröder. Mais elle se heurte au scepticisme des syndicats et du gouvernement. Histoire de contrebalancer les effets de «Hartz IV» (le programme de réduction des indemnités chômage qui mobilise les Allemands tous les lundis depuis trois semaines, lire ci-contre), Franz Müntefering avait repris l'idée des Verts d'introduire un salaire minimum. Une façon de limiter le dumping salarial. En effet, la réforme «Hartz IV» prévoit qu'à compter du 1er janvier 2005 les chômeurs longue durée seront obligés d'accepter les postes proposés par l'ANPE, sous peine de se voir retirer leurs indemnités. Or, ces emplois pourront être rémunérés jusqu'à 30 % en dessous des tarifs des conventions collectives. Cette mesure a créé la panique chez les chômeurs, notamment à l'est. Ces dernières semaines, la presse a évoqué ces postes payés 3 euros de l'heure et des projets du ministre de l'Economie d'introduire des «jobs à 1 euro» de l'heure dans les secteurs caritatifs.
Si le grand syndicat de services Ver.di a accepté l'idée, il n'en est pas de même pour IG Metall. «Nous sommes sceptiques», a déclaré hier Jürgen Peters, le patron du syndicat de la métallurgie, dans une interview au quotidien économique Handelsblatt. «Les expériences passées nous ont appris à ne pas mettre les doigts là-dedans.» C'est qu'IG Metall n'a pas du tout envie de transférer à l'Etat l'un de ses plus grands pouvoirs, qui consiste à négocier les salaires par branche. De facto, si le gouvernement créait un Smic, c'est lui qui aurait la haute main sur la politique salariale. Affaibli par sa grève ratée pour la réduction du temps de travail dans la métallurgie à l'est l'année dernière, IG Metall a perdu 180 000 adhérents en dix-huit mois, pour atteindre le chiffre toujours honorable de 2,53 millions de métallos.
La question divise également les rangs du SPD. Le ministre de l'Economie et du Travail, Wolfgang Clement, estime que ce «n'est pas un instrument adéquat» et qu'il ne faut pas remettre en cause les prérogatives des syndicats en matière salariale, qui sont le fondement même de l'économie allemande. «En France, le Smic n'a créé aucun emploi, et en tout cas pas pour les jeunes», assurait hier matin un économiste interrogé par la radio d'information continue allemande.
L'opposition y est quant à elle opposée, estimant qu'«il y a déjà trop peu de travail pour les emplois non qualifiés». Les manifestants, eux, continuent à exiger le retrait complet des réformes du marché du travail."
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